Comment définir la raison d’être de son entreprise

La raison d’être d’une entreprise permet de lui définir une mission forte et impactante qui répond à la quête de sens.

C’est tout naturellement que Leihia accompagne toutes les entreprises dans leur propre quête de sens en dématérialisant leur raison d’être, à tous les niveaux de l’entreprise.

Ci-dessous un excellent article Harvard Business Review qui explique en 4 points comment définir sa raison d’être.

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Comment définir la raison d’être de son entreprise ?

Le 29/06/2020 par Bertrand Valiorgue

Dans le prolongement de la loi Pacte votée en 2019, de nombreuses entreprises françaises ont entamé des chantiers de réflexion autour de leur raison d’être. Dans cet exercice beaucoup plus délicat qu’il n’y parait, on remarque que les dirigeants ne poursuivent pas les mêmes objectifs. L’observation des cas pratiques fait ressortir quatre types de raison d’être. Ces différentes initiatives sont emblématiques d’un tâtonnement et d’un manque de clarté sur ce qu’est une raison d’être et sur la manière dont elle peut être utilisée.

La raison d’être est incontestablement le nouveau mantra des dirigeants des grandes entreprises. L’année 2019 a été marquée par de nombreux débats en France, dans la lignée de la loi Pacte qui installe la raison d’être dans le Code civil et le Code de commerce. Les mêmes questionnements s’observent aux Etats-Unis à travers le Business Roundtable qui rassemble les dirigeants de grandes entreprises et s’est ouvertement prononcé en faveur « d’une redéfinition de la raison d’être des entreprises afin de promouvoir une économique au service de tous les Américains ». Des deux côtés de l’Atlantique, la raison d’être suscite de nombreux débats et projets de réforme. Mais qu’est-ce qu’une raison d’être exactement ? Que faut-il prendre en compte pour la formuler ? Ni les textes de loi, ni les prises de position des dirigeants ne donnent un sens précis à cette notion. L’observation des expériences actuelles fait ressortir quatre types de raison d’être qui ont des finalités différentes, ce qui montre que les dirigeants interprètent et utilisent cette notion dans un sens différent de celui initialement pensé et voulu par le législateur français.

1. La raison d’être attrape-tout

La raison d’être attrape-tout englobe un nombre important d’enjeux et s’adresse à un large éventail de parties prenantes. Tout le monde semble être en mesure d’y trouver son compte : il s’agit d’une raison d’être qui se veut consensuelle et fédératrice. La raison d’être est constituée d’une série de mots clés. Elle constitue un élément de langage supplémentaire dans la panoplie des outils de communication de l’entreprise. C’est le cas de l’entreprise Atos, dont la mission est de « façonner l’espace informationnel » : « Avec nos compétences et nos services, nous supportons le développement de la connaissance, de l’éducation et de la recherche dans une approche pluriculturelle et contribuons au développement de l’excellence scientifique et technologique. Partout dans le monde, nous permettons à nos clients et à nos collaborateurs, et plus généralement au plus grand nombre, de vivre, travailler et progresser durablement et en toute confiance dans l’espace informationnel ». On comprend, à la lecture de cette raison d’être, que l’entreprise cherche à « façonner un espace informationnel » dont il est difficile de percevoir la nature, les caractéristiques et les enjeux. Il y a une volonté de parler à toutes les parties prenantes de l’entreprise et de les embarquer dans son projet économique en soulignant son ancrage multiculturel. Cette raison d’être cherche l’adhésion du plus grand nombre et est formulée en des termes qui donnent peu de prise à une compréhension « grand public » des défis contemporains qu’Atos veut relever grâce à ses ressources et à ses compétences.

2. La raison d’être opportuniste

La raison d’être opportuniste part d’un enjeu ou d’un défi qui traverse la société et sur lequel l’entreprise entend se positionner et montrer qu’elle a une contribution importante. Cette raison d’être ne s’adresse pas directement aux parties prenantes de l’entreprise, mais au grand public. C’est le cas de Veolia, dont la raison d’être est « de contribuer au progrès humain, en s’inscrivant résolument dans les objectifs de développement durable définis par l’ONU, afin de parvenir à un avenir meilleur et plus durable pour tous. C’est dans cette perspective que Veolia se donne pour mission de ‘ressourcer le monde’, en exerçant son métier de services à l’environnement ». La raison d’être met en lien le métier de l’entreprise avec les défis sociétaux du moment. Elle montre que l’entreprise ne se trompe pas de siècle et qu’elle entend participer à des dynamiques de progrès social et environnemental. On ne voit pas, en revanche, comment cette ambition est connectée à un portefeuille de ressources et de compétences qui distinguent l’entreprise de ses concurrents et des autres acteurs de son secteur d’activité.

3. La raison d’être qui ne mange pas de pain

La raison d’être qui ne mange pas de pain rappelle les fondements historiques de l’entreprise. Elle met en mots l’ADN de l’entreprise et l’inscrit dans les statuts. C’est le cas du Crédit agricole, qui a été une des premières entreprises françaises à adopter une raison d’être. Cette raison d’être rappelle que la banque « agit chaque jour dans l’intérêt de ses clients et de la société ». Ce type de raison d’être ne met pas en lumière un défi sociétal en particulier, ni en tension l’entreprise : elle réaffirme une contribution et un savoir-faire. Elle est consensuelle et suscite généralement peu de débats, aussi bien en interne qu’en externe, car elle correspond assez bien à ce qu’est et ce que fait l’entreprise à l’instant t.

4. La raison d’être pivot

La raison d’être pivot connecte l’entreprise à un défi sociétal auquel elle entend contribuer et qui met en tension ses compétences ainsi que son modèle économique. Elle est la marque d’une ambition et d’une insatisfaction. Elle verbalise l’intention de faire pivoter l’entreprise vers un ensemble de solutions susceptibles de répondre à des besoins sociétaux ou à de grands défis, mais qui percutent les fondements de son activité. C’est le cas de Carrefour : « Notre mission est de proposer à nos clients des services, des produits et une alimentation de qualité et accessibles à tous à travers l’ensemble des canaux de distribution. Grâce à la compétence de nos collaborateurs, à notre démarche responsable et pluriculturelle, à notre ancrage dans les territoires et à notre capacité d’adaptation aux modes de productions et de consommation, nous avons pour ambition d’être leader de la transition alimentaire pour tous. » La raison d’être de Carrefour est tendue vers un objectif sociétal dont l’importance est prégnante : la transition alimentaire. Cet objectif nécessite de développer des capacités d’adaptation en s’appuyant sur des compétences internes et un ensemble de solutions. La raison d’être est ici un défi à relever et une mise en mouvement de l’entreprise, qui rappelle la nécessité de se transformer. C’est ce dernier type de raison d’être qui se rapproche le plus des intentions initiales du législateur français.

Mettre l’entreprise en tension

Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise raison d’être, et les dirigeants vont s’appuyer sur cet outil pour répondre à des objectifs qui ne sont pas identiques d’une entreprise à une autre. Il semble cependant utile d’avoir en tête les trois enjeux suivants pour travailler et définir une raison d’être.

Repérer les points d’inflexion stratégique. La notion de point d’inflexion stratégique a été popularisée par l’ancien P-DG d’Intel, Andy Grove. Elle signifie qu’au cours de son existence, une entreprise est inévitablement confrontée à des ruptures qui remettent en question ses fondamentaux. Ces points de rupture peuvent être technologiques, réglementaires, sociétaux ou environnementaux. Dans l’esprit d’Andy Grove, ces points de rupture signifient l’apparition de nouvelles opportunités ou tout simplement la fin de la partie pour l’entreprise dont les compétences et les solutions deviennent progressivement obsolètes. Ces points d’inflexions stratégiques sont rarement exprimés de manière claire et explicite. Pour être repérés, il est important d’être attentif aux signaux faibles qui se manifestent dans l’environnement. La raison d’être de l’entreprise doit être reliée à ces points d’inflexions stratégiques qui, d’une manière ou d’une autre, vont venir percuter l’activité de l’entreprise dans un avenir plus ou moins proche. La transition alimentaire, en raison du changement climatique et de la transformation des modes de consommation, va immanquablement impacter le groupe Carrefour. La raison d’être exprime le fait que les pratiques, les habitudes et les technologies sont en train de profondément changer l’environnement de l’entreprise et que cette dernière doit nécessairement procéder à des ajustements.

Parler à l’interne comme à l’externe. Les dirigeants semblent hésiter quant aux cibles visées par la raison d’être de leur entreprise. Convient-il de parler aux salariés, aux différentes parties prenantes ou au grand public ? Ces trois cibles sont effectivement importantes. La raison d’être doit être formulée de manière à être signifiante pour chacune d’entre elle, en formant un récit cohérent et consistant qui part des évolutions sociétales, interpelle les parties prenantes de l’entreprise et concerne au premier plan les salariés. Il ne s’agit pas de dire que l’entreprise a conscience des transformations en cours et qu’elle est soucieuse de ses parties prenantes. Il s’agit bien de créer, à travers un discours, une communauté d’acteurs, prête à s’embarquer dans un projet économique face à de nouveaux défis qu’il est incontournable de relever, dans l’intérêt de tous.

Questionner les expertises et les savoir-faire. La raison d’être doit, d’une manière ou une autre autre, être reliée aux compétences et au savoir-faire de l’entreprise. Elle doit les mettre en tension et souligner la nécessité de leur évolution pour s’adapter aux transformations repérées dans l’environnement. La raison d’être n’est pas qu’un discours qui change les mentalités et les croyances. Elle véhicule un questionnement sur les pratiques, les technologies et les compétences de l’entreprise. Elle est l’expression d’un droit d’inventaire et d’un questionnement de fond. Que sait faire l’entreprise ? Que doit-elle apprendre ? Que doit-elle arrêter de faire ? La raison d’être est l’occasion de dresser un constat lucide sur l’état des compétences de l’entreprise.

La prise en compte de ces trois enjeux permet de stabiliser une première définition que chacun pourra contester et enrichir. La raison d’être combine trois dimensions : elle est une représentation consistante et cohérente de ce que veut faire l’entreprise ; elle exprime une volonté d’apporter des solutions concrètes aux défis contemporains qui remettent en cause les fondements de son activité économique ; elle implique l’ensemble des parties prenantes et induit un questionnement sur le cœur de métier de l’entreprise et son portefeuille de ressources et de compétences.

Une entreprise n’a pas forcément besoin de formuler et d’inscrire une raison d’être dans ses statuts pour bien fonctionner et apporter une gamme de produits et de services utiles pour ses clients et pour la société dans son ensemble. Le questionnement sur la raison d’être n’a de sens que dans le cadre d’un projet de transformation de grande ampleur. C’est parce qu’il y a une accumulation de signaux faibles dans l’environnement qui montrent que les attentes changent et qui fragilisent les fondamentaux de l’entreprise que la raison d’être prend un réel intérêt. Dans cette situation, la raison d’être englobe des interrogations de fond sur la contribution de l’entreprise à la vie de la cité, sur la qualité des relations qu’elle entretient avec ses parties prenantes et sur tout ce qu’elle sait faire ou devrait savoir faire. Elle implique une introspection de l’ensemble du corps social et ne peut en aucun cas se réduire à une simple question statutaire. En dehors de cette logique d’introspection et de bifurcation, la raison d’être glisse très facilement vers un simple outil de communication dont les gains à court terme doivent sérieusement être évalués par rapport aux effets boomerang qu’elle peut générer.

Auteur: Bertrand ValiorgueProfesseur en stratégie et gouvernance des entreprises à l’IAE Clermont Auvergne. Ses recherches portent sur la gouvernance des entreprises, la responsabilité sociale et le management stratégique des externalités négatives. Il a été visiting scholar à la London School of Economics. Ses travaux ont été publiés dans des revues de références […]

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